Le "23 de Enero" - Caracas

samedi 27 août 2005.
 
C’est notre QG principal que nous rejoignons dès notre arrivée à Caracas, le 14 juillet 2004, un quartier fait de brique et de béton.

10 aout EL 23 DE ENERO - parroquia sucre

Les grands immeubles du « 23 de Enero » ont été construit entre 1954 et 1957 sous le règne du dernier dictateur, Marcos Pérez Jiménez, qui souhaitait a travers ce grand projet urbanistique, inspire de Le Corbusier, développer et moderniser les logements sociaux a Caracas. Derrière ces louables intentions, le pouvoir en place souhaitait surtout nettoyer le quartier pauvre de ses petites ruelles sombres et faciliter le contrôle de la population. Pour plus d’info sur l’historique www.el23.net. Le quartier aurait pu être un charmant lieu de vie populaire pour ses 60 000 habitants. Plus de 9000 appartements repartis dans 38 immeubles, 22 écoles, 2 marches, 2 centres culturels, 8 garderies, 25 centres commerciaux et une foule de petits commerces de proximités, sans compter les terrains de sports et les aires de jeux. « Les Bloques » sont assez espacés pour laisser la végétation, toujours luxuriante, prendre une large place, dans ce paysage qui offre également aux habitants une vue agréable sur la montagne Avila et les collines qui entourent Caracas. Le tout a 15 minutes en métro du centre ville et à 1 heure en bus de la cote. Communautés et pouvoirs politiques Pourtant nous sommes ici dans un quartier reconnu pour son histoire de lutte et de confrontation avec le pouvoir. Tous les gouvernements antérieurs parlent de « zone rouge » ou encore « zone subversive ». Situé à l’ouest de Caracas, peu de vénézuéliens n’osent s’aventurer au « 23 de Enero ». Aujourd’hui, le quartier voit se construire sur les collines avoisinantes un enchevêtrement de petites maisons de briques rouges. Constructions de fortunes qui transforment ce « joyau de l’urbanisme social » en Barrio de Caracas, un concentré de misère et de violence. Les habitants du « 23 » sont très organisés. Depuis plusieurs générations la communauté voit émerger de nombreux groupes politiques, sociaux et culturels actifs qui ont forgés la réputation du quartier. Les différentes luttes et confrontations violentes avec le pouvoir, ont soudé les habitants du « 23 » autour de ses travailleurs sociaux, militants, leaders politiques, artistes engagés et martyrs. Carlo Reina, militant, tué a 31 ans près de chez lui par la Guardia Nationale le 5 mars 1973 ; Sergio Rodriguez, universitaire, fondateur du « grupo cultural hombre nuevo » assassiné par la police lors d’une manifestation étudiante le 23 septembre 1993 a l’age de 27 ans ; Alexis Gonzales, militant de la Coordinadora Simon Bolivar, mort le 11 avril 2002 lors du coup d’Etat de l’opposition, alors qu’il manifestait devant le palais présidentiel pour réclamer le retour de Chavez au pouvoir, comme des milliers de Vénézuéliens. Avec le changement politique engagé depuis 1999, les espoirs fleurissent au « 23 », les programmes sociaux du Président Chavez sont effectifs dans tout le quartier (missions Ribas, Robinson, Sucre, Barrio adentro, mission Mercal, vuelvan caras). L’investissement de la population est grand, permettant le développement d’une énergie nouvelle. Le quartier reste pourtant fidèle a sa tradition et les groupes politiques semblent contrôler tout le processus, contrairement a d’autres quartiers populaires ou la base s’est elle-même organisée. Ceci occasionne quelques mésententes et un manque de communication entre les habitants et les militants. Pour exemple, la réalisation d’une peinture murale par un groupe d’indépendantistes basques accueilli par la Coordinadora Simon Bolivar a suscité de nombreuses protestations au sein de la communauté. La fresque représente un militant basque cagoulé et armé d’une mitraillette, a ses côtés le portait d’un de leur martyr, entre les deux figures un point levé quelque peu agressif. Ce projet réalisé sans aucune concertation avait de quoi heurter la population. La lutte armée, la figure du martyr et le drapeau basque s’affichants sur les murs du quartier et qui plus est sur le trajet de l’école, s’en était trop pour la communauté : réunion de crise a la bibliothèque, il est décide que la fresque sera recouverte. On attend encore... Coupures d’eau et autres déboires... Le dynamisme communautaire et les espoirs politiques ne doivent pas occulter la pauvreté, le chômage, l’insécurité et les dysfonctionnements de pouvoirs publics. Un des fléaux de la misère ambiante : les déchets. Il n’y a quasiment pas de poubelles dans le quartier, les ordures ménagères sont stockées dans d’énormes bennes a ciel ouvert qui se trouvent au bas de chaque immeuble. Le ramassage s’effectue un peu près une fois par semaine, sans réelle garantie. Le problème des ordures est présent dans tous les quartiers populaires, absence de mesures éducatives, conflit politique entre les autorités compétentes qui se renvoient la balle (entre la municipalité du quartier et la mairie de caracas, opposants politiques). Dysfonctionnement généralisé qui détériore considérablement le pays grand consommateurs de plastique et accentue le manque d’hygiène (les rats et autres souris peuplent « el 23 de Enero »).Comme dans la plupart du pays, les coupures d’eau sont récurrentes, chacun organise ses réserves afin de pallier au plus urgent en cas de coupure prolongée. Sans parler des systèmes plus ou moins sophistiques pour obtenir une eau potable, filtrée ou bouillie, parfois les deux. Depuis plus de 15 jours, dans le bloque 19, ou nous vivons, il n’y a plus de lumière dans les communs. La société gérante a coupe l’électricité a cause d’une dette cumulée de 17 millions de bolivars (environ 5600 euros). L’ascenseur est de fait hors service et les escaliers plus sombres que jamais, une galère supplémentaire quand on pense que l’immeuble compte 14 étages (nous sommes au 13eme). Au dela de ces petits tracas, la vie suit son cours et voila bientôt deux mois que nous vivons au « 23 de Enero », rapidement acceptés par les habitants du quartier, nous sommes les francais. Le quartier nous est devenu familier, nous y avons quelques habitudes, là les bons jus de fruits, ici la meilleure connexion internet ...


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