Bolivie : vers une nouvelle constitution

mercredi 11 mai 2005.
 
Petit récit personnel d’une constitution qui se prépare, démocratiquement, loin de l’Europe, en Bolivie

Ce 5 mai au matin je m’engouffre dans la salle de conférence de la Chambre minière de Potosi, Bolivie. Peu à peu les gens arrivent jusqu’à remplir les 250 places. Toute la diversité de la population de la région de Potosi est là. Femmes et hommes de la ville et de la campagne. Facile de faire la différence. Ceux de la ville se protègent du froid automnal dans de grands manteaux ou veste de cuir ; vêtements de ville.... Ceux de la campagne sont arrivés ensemble, une banderole devant eux accompagnée du winphala, drapeau des communautés indiennes-originaires Quechua. Ils portent chacun ces vêtements multicolores traditionnels reflétant leur appartenance à tel village, telle communauté. Poncho vert, rouge, mauve, avec des tissages colorés et riches de motifs ; des chapeaux en cuir, rond des bonnets bleu et rose sur fonds blanc. Toute la multiculturalité de la population locale est là venant parfois de très loin. L’événement doit être d’importance.

La conférence commence introduite par un sénateur. En cette matinée, les politiques, autorités des communautés indiennes, responsables d’associations ou simple citoyens sont venus écouter une brochette de parlementaires présenter ici comme dans chacune des capitales régionales un projet de loi. Ces parlementaires eux vont dans tout le pays écouter les remarques, objections, propositions de modifications de la population. Chacun peut prendre la parole en espagnol ou en quechua durant cinq minutes.... Quel est cet engouement démocratique participatif qui réunit les foules ?

Ce forum citoyen a pour but de présenter le projet de loi convoquant l’assemblée constituante. La Bolivie a décidé de se doter d’une nouvelle constitution ; pas du genre de celle que l’on tricote dans le dos des citoyens, non là on utilise ce long processus que l’on nomme démocratie, en convoquant une assemblée constituante.

Mais pour cela il faut définir comment la convoquer cette assemblée et qui en fera partie ; Alors on élabore un projet de loi. Mais dans un soucis de prendre en compte la volonté populaire et s’assurer de la participation de 60% de la population indienne du pays alors les parlementaires traversent le pays pour présenter le projet de loi et proposer deux options de composition d’assemblée constituante...

Et je peux vous dire que ça a discuté, écouté et respecté la parole de l’autre. En 2006, 180 (sans doute) citoyens boliviens élus et émanant de la société civile se réuniront pour un an, afin d’écrire la nouvelle constitution qui sera ensuite approuvée. Un beau travail de consensus à s’asseoir à 180 avec toutes ses différences et écrire un texte, une constitution.

Alors, durant ces 5 heures de discussions je pense à nous là-bas en Europe, dans ce beau continent des Lumières, dans cette France fière et célèbre pour sa déclaration des droits de l’homme. Je pense à cette constitution pour laquelle on est appelé à s’exprimer le 29 mai prochain.

Là, les Boliviens ils nous infligent une leçon de maître. Le 29 mai prochain, nous avons la chance de pouvoir, pour la première fois, nous exprimer sur l’Europe. Un référendum, une consultation ou le peuple décide de son avenir, nous offre cette possibilité de nous exprimer ; Hors, on nous propose un texte, à dix milliards de lieux de ce que l’on peut attendre d’une constitution puisqu’il a tout d’un traité et a été élaboré dans un beau refus de la démocratie (politiques non élus par le peuple et je ne parle pas du scandale des frais d’hôtel de Giscard).

Boliviens, venez au secours de l’Europe ! ! !

Steve, depuis Potosí (Bolivie)

Ce texte a été publié sur le site Intergalactique : http://www.intergalactique.lautre.net/article.php3 ?id_article=598


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